dimanche 16 mars 2025

Le populisme une exacerbation des contradictions du capitalisme

La montée des populismes : la droite.

La question du populisme est prégnante tant à droite qu'à gauche. En avril 2011 Werner T. Bauer analysait déjà la montée des populismes de droite en Europe.

Il en donnait une méthodologie :

"Le populisme se nourrit du « scandale » (qu’il met souvent lui-même en scène) et de la « crise » permanente. Le populiste fournit les scandales ; en contrepartie, les médias lui apportent la célébrité."

Son analyse prédictive s'est révélée juste :

"Il est donc effectivement à craindre que le populisme de droite ne devienne le seul contrepoids aux convulsions productivistes d’une économie mondialisée et déréglementée."

Il rejoint en cela les écrits de Jacques Ellul sur le fascisme fils du libéralisme

"L’économie libérale était obsédée par la question de la production. Il fallait produire au maximum et par là développer ce qu’on appelait l’économie générale, et le libéralisme insistait sur le fait que la meilleure méthode de production était, sans contredit, la méthode de libre concurrence et de libre échange. [...] Les industriels ont cherché du fait de la libre concurrence à fausser l’équilibre à leur profit, mais du fait du laisser faire, ils n’ont pas essayé de le fausser dans l’économie, les portes leur étaient fermées ici. [...] En définitive, et c’est là le point marquant du développement extrême de l’économie libérale : multiplication des emplois et des dépenses improductives. Cette multiplication n’arrivait pas cependant à employer tous les ouvriers libérés. Chômage consécutif. Après l’abandon des techniques récentes, l’abandon des forces humaines de travail. [...] Mais au travers de ce stade d’économie dirigée (stade fatalement amené par le libéralisme comme nous l’avons vu) nous voyons apparaître le fascisme lui-même."

La montée des populismes : la gauche.

Le populisme, qu'il soit de droite ou de gauche, se caractérise par une opposition entre "le peuple" et "les élites". Cependant, ces deux formes de populisme se distinguent par leurs idéologies, leurs cibles et leurs propositions politiques. 

Le populisme de droite cible principalement les immigrants et les élites politiques, tandis que le populisme de gauche s'attaque aux élites économiques et aux structures qui maintiennent les inégalités. Justice sociale et économique, anti-élitisme et solidarité internationale sont les fondamentaux des populistes de gauche, cela diffère diamétralement des fondamentaux des populistes de droite. 

Le parallèle pouvant être fait se porte sur la présentation médiatique de ses objectifs politiques. Nous penserons aux méthodes de communication de La France Insoumise où la création de scandales est organisée parfois au détriment du sujet politique de base : par exemple les réformes destructrices du système de retraite français.

Thomas Portes, le pied sur un ballon sur lequel on distingue le visage du ministre du Travail, Olivier Dussopt.

Sophia Chikirou comparant Fabien Roussel à Jacques Doriot.
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Dans leur livre "Hégémonie et stratégie socialiste" daté de 1985, Ernesto Laclau et Chantal Mouffe rejettent le déterminisme économique marxiste et l'idée que la lutte des classes est l'antagonisme central de la société. À la place, ils proposent une approche centrée sur le "discours" et la contingence des relations sociales.

Laclau fonde sa pensée sur son expérience personnelle ayant vécu et analysé le péronisme argentin. Laclau a analysé comment, durant son exil, Perón a réussi à articuler un discours capable de fédérer diverses demandes sociales et politiques, créant ainsi une identité collective parmi des groupes hétérogènes. Cette capacité à unifier des revendications disparates autour d'un leader charismatique a été centrale dans la conception de Laclau du populisme en tant que stratégie politique.


En 2005, dans le livre "La raison populiste" il décrit le populisme comme une logique politique. Il y théorise les signifiants vides. L'utilisation stratégique des signifiants vides permet aux acteurs politiques de construire des discours hégémoniques, c'est-à-dire des récits dominants qui orientent les perceptions et les actions au sein de la société. En investissant des signifiants vides de significations spécifiques, les forces politiques cherchent à obtenir un soutien maximal pour leur vision du monde. Cette lutte pour le contrôle des signifiants vides est au cœur des dynamiques politiques et des processus de légitimation du pouvoir. 

Ce sont des termes ou symboles comme "égalité" ou "nation" suffisamment vagues pour fédérer des groupes divers autour d’une cause commune. Par exemple, un leader populiste peut incarner ce signifiant, cristallisant les espoirs et frustrations d’une population.

"JE SUIS LE BRUIT ET LA FUREUR, LE TUMULTE ET LE FRACAS"


Dans son essai "Les Institutions invisibles", Pierre Rosanvalon analyse la crise de défiance et l'érosion du lien social qui fragilisent les démocraties contemporaines, préparant le terrain aux populismes autoritaires et xénophobes. Cette érosion du lien social et la défiance généralisée envers les institutions formelles sont le signe d'une fragilisation de la légitimité politique. Cette situation, illustrée par des exemples comme la République de Weimar s'effondrant face au nazisme, prépare selon lui le terrain aux "mirages populistes" et à un "fatalisme résigné". La démocratie, bien que dotée d’institutions qui fonctionnent, devient politiquement impuissante si elle perd ces fondations invisibles.

Le philosophe Michaël Fœssel et le sociologue Etienne Ollion établissent eux aussi une critique du populisme. Dans leur ouvrage "Une étrange victoire. L'extrême droite contre la politique", ils analysent l'influence du langage de l'extrême droite dans le débat public et mettent en garde contre le risque pour la gauche de se laisser entraîner dans des dérives populistes


C'est une analyse également partagée par Bruno Karsenti.


Une analyse de la montée des populismes


Un décalage se créée entre l’évolution des technologies et l’inadaptation des rapports de production. L’automatisation, la mondialisation et la numérisation transforme profondément l’appareil productif, mais les rapports de production que sont la propriété privée des moyens de production et l’organisation du travail restent souvent figés dans un schéma de domination capitaliste.

Ce décalage entraîne non seulement une baisse tendancielle du taux de profit mais également une précarisation des travailleurs. L'intelligence artificielle et la robotique augmentent la composition organique du capital par le rapport entre capital constant et le capital variable. Cette évolution réduit la part du travail humain dans le processus de production, et affecte le taux de profit. 

En 2024, la Bourse américaine, notamment l’indice S&P 500, a enregistré des gains de plus de 28 %. Le Nasdaq a affiché une hausse similaire, autour de 30 %. Ces performances ont perduré malgré une croissance aux États-Unis estimée à environ 2 % en 2024.

Les secteurs de la construction, le commerce et l'automobile ont annoncé des plans sociaux, souvent liés à l'automatisation et à l'adoption de nouvelles technologies.  Les groupes Vinci et Bouygues investissent dans l’automatisation, mais les petites entreprises, qui dominent le secteur, n’ont pas les moyens de suivre, d’où des fermetures et des licenciements. 

L’automatisation des caisses, la robotisation des entrepôts, l’arrivée de l’IA pour la gestion des stocks remplacent progressivement les emplois traditionnels. Le commerce en ligne des plateformes comme Amazon ou Temu, concurrence les magasins physiques, rendant certains postes obsolètes. En novembre 2024, Michelin a annoncé un plan social visant 1 250 emplois en France, lié à une baisse des ventes de pneus pour véhicules thermiques et à une transition vers l’électrique. La nouvelle dynamique de production aboutit à une suraccumulation de capital et à la précarisation du travail, le fossé entre la majorité laborieuse et une minorité capitaliste s’élargit. Ce fossé se traduit par une colère collective que certains leaders populistes exploitent pour canaliser le mécontentement, en promettant une réappropriation du pouvoir et une rupture avec l’ordre établi.

La mondialisation et la délocalisation redistribuent la production à l’échelle mondiale et concentrent le pouvoir économique dans certains centres. Ceci créée un sentiment d’exclusion et d’aliénation. Marx analysait l'aliénation des travailleurs comme une conséquence de leur dépossession des moyens de production. Aujourd'hui, cette aliénation se manifeste par un sentiment d'impuissance face à la globalisation et à la technocratie, ce qui pousse certains à se tourner vers des discours populistes qui promettent de "rendre le pouvoir au peuple".

Ces discours populistes aboutissent au fractionnement de la classe ouvrière, divisée entre ceux qui bénéficient encore des restes de l'État-providence et ceux qui sont exclus du système. Cette division affaiblit la solidarité de classe et rend plus difficile l'émergence d'un mouvement anticapitaliste unifié.

La montée des populismes est une conséquence des contradictions et des crises générées par le capitalisme globalisé. 

Illustrations croisées : le cas Trump et Milei

Trump :

Les États-Unis ont subi une désindustrialisation massive depuis les années 1970, avec des usines fermées et des emplois délocalisés vers des pays à bas coûts de main-d'œuvre. Cela a particulièrement touché les régions industrielles du Midwest, autrefois prospères.

La financiarisation de l'économie américaine a accru les inégalités, avec une concentration des richesses entre les mains d'une petite élite, tandis que les classes ouvrières et moyennes ont vu leurs conditions de vie se dégrader.  Selon le Pew Research Center la part des richesses détenue par les ménages à hauts revenus (top 20 %) est passée de 29 % en 1970 à 48 % en 2018, tandis que celle des classes moyennes a chuté de 62 % à 43 %. Selon Yahoo Finance 81 % des actions du S&P 500 sont détenues par les 10 % les plus riches.

Les institutions politiques et médiatiques sont perçues comme étant au service des élites économiques, ce qui a alimenté un sentiment de trahison et de colère chez une partie de la population. Toujours selon le Pew Research Center, la confiance des Américains dans le gouvernement fédéral est tombée à 17 % en 2024, proche de son plus bas historique (15 % en 2011). Une enquête spécifique révèle que 74 % des Américains pensent que "les politiciens travaillent pour les intérêts des grandes entreprises et des riches" plutôt que pour le peuple.



Une étude Gallup/Knight Foundation montre que 55 % des Américains jugent les médias "biaisés" en 1999, contre 32 % en 2016. 


Donald Trump a su exploiter et canaliser cette colère en se présentant comme le défenseur des "oubliés" de la globalisation, promettant de "rendre sa grandeur à l'Amérique". Son discours anti-élites, anti-médias et anti-globalisation a résonné auprès des travailleurs précarisés. Cette canalisation s'est exprimée par la désignation de boucs émissaires : les immigrés, les élites "cosmopolites", et les accords commerciaux type ALENA.  Dans son premier mandat, Trump a poursuivi des politiques économiques néolibérales, comme la réduction des impôts pour les entreprises et les riches, tout en dérégulant davantage l'économie. 

La manipulation : Le vote de la catégorie ouvrière des électeurs de Trump, a permis la mise en place d'un programme qui ne répondait pas à leurs intérêts économiques réels. 

La Tax Cuts and Jobs Act de 2017 a permis des augmentations salariales. Cependant elles ont principalement profité aux hauts revenus, aux propriétaires et aux cadres, laissant les 90 % inférieurs des travailleurs inchangés. Les salaires médians ont augmenté de seulement 0,09 % de plus dans les deux ans suivant la réforme.

Trump a imposé des droits de douane sur des produits chinois (25 % sur 250 milliards de dollars d’importations), visant à protéger les emplois industriels américains. Les ouvriers industriels n’ont pas vu de retour massif d’emplois, tandis que les coûts des biens de consommation (électroménagers, vêtements) ont augmenté pour tous. Selon le Bureau of Labor Statistics, les emplois manufacturiers aux États-Unis sont passés de 12,4 millions en janvier 2017 (début du mandat de Trump) à 12,8 millions en février 2020 (avant la pandémie), soit une augmentation de seulement 400 000 emplois en trois ans.


Cela illustre le concept de "fausse conscience", où les travailleurs soutiennent des politiques qui renforcent leur propre exploitation.

Milei : 

L'Argentine était confrontée à une inflation galopante, à une dette publique insoutenable et à un chômage élevé. Ces problèmes sont en partie liés à la dépendance du pays aux capitaux étrangers et aux politiques d'ajustement structurel imposées par le FMI. Les crises économiques répétées ont appauvri une grande partie de la population, créant un terreau fertile pour les discours populistes. Les partis traditionnels péronistes et libéraux étaient perçus comme corrompus et incapables de résoudre les problèmes du pays.

Selon les données de la Banque mondiale et de l'INDEC, les inégalités de revenus se sont creusées au cours des dernières décennies. Les 10 % les plus riches de la population concentrent une part disproportionnée des richesses, tandis que les 40 % les plus pauvres voient leur situation se dégrader.


En Argentine, comme dans de nombreux autres pays, les médias sont largement contrôlés par un petit nombre de groupes puissants. Depuis les années 1990, sous les présidences de Carlos Menem et Fernando de la Rúa, les politiques de dérégulation ont favorisé la consolidation de grands groupes. 



Le groupe Clarín, possède des journaux (Clarín, le plus vendu), des chaînes de télévision (El Trece, TN), des radios (Mitre), et contrôle Cablevisión, un leader des télécoms. 

Une étude de l'Open Edition Journals note que 78 % du marché des médias était concentré entre les quatre premiers opérateurs en 2009 (Clarín, Uno, Vila-Manzano, Cadena 3). Paradoxalement la politique de dérégulation prônée par Milei via la Ley Omnibus a permis le renfort de ces grands groupes. En 2024, Clarín a renforcé sa position dans les télécoms via Cablevisión, profitant de la libéralisation des services internet et de la fin des régulations strictes sur les fusions. Ce qui conduit Milei a vouloir contrecarrer les effets de sa propre politique.

Cette concentration limite la diversité des opinions et renforce la perception que les médias servent les intérêts des élites. Le cabinet de conseil Zubán Córdoba y Asociados nous apprend que 80,5 % ont déclaré avoir une "méfiance" envers les médias, seulement 14,2 % ont déclaré avoir encore "confiance".

La manipulation médiatique: Les inégalités économiques et la défiance envers les médias se renforcent mutuellement. Cette défiance a ouvert la voie à des figures populistes comme Javier Milei, qui utilisent les réseaux sociaux et les médias alternatifs pour diffuser leur message. Milei, par exemple, a construit sa base électorale en critiquant violemment les médias traditionnels et en se présentant comme une voix alternative.


Javier Milei incarne un populisme libertarien qui prône une réduction drastique de l'État, une dérégulation massive de l'économie et une libéralisation totale des marchés. L
es travailleurs ont voté Milei en masse (40 % des 18-34 ans, selon Exit Polls 2023), séduits par son rejet de la "caste" et ses promesses de prospérité via le marché libre.

La DNU a conduit a la suppression des indemnités de licenciement, l'allongement de la période d’essai, la réduction des cotisations sociales.

Selon l’INDEC au 4e trimestre 2024, le chômage est resté stable à 7 %, mais le travail informel a grimpé à 47 % de la population active, et les salaires réels ont chuté de 20 % face à une inflation de 289 % en 2024. Les attentes d’emplois stables et bien rémunérés sont trahies au profit des profits patronaux.


Les hausses des tarifs ont amputé le pouvoir d’achat des couches populaires: en un an, le niveau général des prix a augmenté de 67 %, tandis que les services ont augmenté de 174 % et l’éducation de 150 %.  La plus forte augmentation concerne la facture de gaz, en hausse de 573 % par rapport à février 2024, et la facture d'eau, en hausse de 311 %. 

Les profits des entreprises privatisées comme Edenor explosent. Les attentes d’un meilleur niveau de vie sont sacrifiées pour les intérêts des capitalistes.

Selon l'analyse d'Ellul : Le Trumpisme est un enfant du néolibéralisme américain ayant conduit à la paupérisation des travailleurs des Etats Unis d'Amérique.

Milei est un enfant des contradictions du péronisme qui via la présidence de Carlos Menem (1989-1999), a adopté des politiques néolibérales (privatisations, dérégulation, ouverture aux capitaux étrangers), s'éloignant de ses principes originels de justice sociale.

Le deux ont pu canaliser les colères et prospérer sur les conséquences de politiques abaissant le niveau de vie des travailleurs tout en mettant eux-mêmes en place des politiques qui continuent cet abaissement.


Entre le continent Américain et l'Europe : 

L'analyse de Laclau sur le continent Sud Américain se calque sur une tradition caudilliste, une histoire coloniale favorisant une rhétorique anti-impérialiste et une moindre intégration supranationale. 

Les partis de gauche populistes européens n'ont pas rencontré de victoires majeures ou dans la durée. 

L’UE impose des cadres économiques rigides (règles budgétaires, Pacte de stabilité) qui limitent les marges de manœuvre des populistes de gauche. Syriza, par exemple, a dû céder à la Troïka en 2015 sous peine de Grexit, trahissant ses promesses radicales. 

Les systèmes parlementaires en Espagne ou au Portugal obligent souvent les partis populistes de gauche à s’allier avec des sociaux-démocrates modérés (PSOE, PS), diluant leur radicalité. Podemos n’a jamais gouverné seul.

Contrairement aux populismes de droite (RN, Fidesz), qui s’appuient sur des structures centralisées et un nationalisme unificateur, les partis populistes de gauche souffrent de divisions idéologiques (anarchistes vs socialistes, écologistes vs ouvriéristes). Podemos s’est fracturé après 2019 entre Iglesias et Díaz.

Le populisme de droite comme l'AfD en Allemagne capte mieux la colère anti-élite en Europe en jouant sur l’immigration et le souverainisme, thèmes plus mobilisateurs que l’anticapitalisme de gauche dans le contexte actuel.  Le BSW de Sahra Wagenknecht a obtenu 5 % aux dernières élections.

Le modèle de BSW se calquait sur celui de La France Insoumise



L'affaiblissement des communistes européens post effondrement de l'URSS a laissé un vide à gauche, mais il n'a pas été comblé par un populisme de gauche fort. Le populisme de gauche a remporté des victoires en Europe, mais elles ne sont ni importantes ni durables. La capitulation de Syriza face à l’austérité illustre les limites et renvoie aux mesures libérales prises en Argentine dans les années 90. 

Le populisme de droite, est mieux adapté aux angoisses identitaires actuelles, il domine davantage, sait créer un tempo et un agenda médiatique forçant le reste de la droite à suivre ce terrain. C'est une des théories politiques formulées par François Duprat.



Les classes populaires sont souvent divisées entre les travailleurs urbains, les travailleurs ruraux, les jeunes précaires et les retraités. Cette fragmentation rend difficile la construction d'une coalition électorale large autour d'un projet populiste de gauche. Pire cette fragmentation est parfois encouragée par les populistes de gauche, elle renforce alors la théorisation des populistes de droite notamment sous le vocable des "bobos déconnectés."

Le populisme de gauche, lorsqu'il fragmente trop son discours en multipliant les revendications spécifiques, peut involontairement renforcer le narratif du populisme de droite.

En fragmentant les électorats cette gauche participe à la destruction de la conscience de classe unifiée.  La gauche peine à mobiliser un large front populaire contre les inégalités économiques et le pouvoir du capital. Nous nous heurtons à un plafond de verre depuis plusieurs années. 

Comment faire ?

En recentrant le discours sur les antagonismes fondamentaux entre travailleurs et détenteurs du capital, plutôt que sur des oppositions culturelles et sociétales qui divisent plus qu'elles ne rassemblent. 

En adoptant une approche matérialiste et universaliste, la gauche pourra réaffirmer son rôle historique : être la force politique de l'émancipation collective et de la justice sociale.

Dans le cadre capitaliste européen le populisme vainqueur est celui de droite. En appliquant la méthode populiste certains partis de gauche ont involontairement validé des antagonismes qui ne sont pas de classe et donc ont contribué à l'effacement de cette conscience.

Nous devons arrêter cela.

dimanche 2 mars 2025

Le communisme : en revenir ou pas

 Au cour d'une discussion j'ai reçu ce message. C'est un classique que nous recevons souvent.




1) Concernant le déclin politique

Remontons le temps : 

L'Union des Républiques Socialistes Soviétiques est dissoute le 26 décembre 1991. Les accords de Minsk du 8 décembre 1991 (signés par l'Ukraine, la Biélorussie, la Russie) entérinent la fin de L'Union.

Du 19 au 21 août 1991, un pustch est lancé à Moscou. L'objectif était de lutter contre la pérestroïka qui contrevenait directement à la politique communiste établie depuis plus de 60 ans. 

Le 17 mars 1991, un référendum demandait aux pays membres de l'Union s'ils souhaitaient "préserver l'Union des Républiques socialistes soviétiques en tant que fédération renouvelée de républiques souveraines et égales, dans laquelle les droits et les libertés de toute nationalité seraient pleinement garantis".

Sur les 15 Républiques six n'ont pas pris part au vote : l’Arménie, la Géorgie, la Moldavie et les républiques baltes. Toutes les autres ont participé au vote et ont soutenu massivement ce référendum.




Lors des débats sur internet il est souvent souligné que ce référendum visait à valider le fait que l'URSS pour se sauver devait quitter son ancienne organisation socialiste. 

La manière dont est formulé le référendum est vague et a permis des interprétations différentes selon les camps politiques qui se dessinaient : conservateurs, réformateurs, indépendantistes. Les réformateurs voyaient un plébiscite pour le maintien de la glasnost et de la pérestroïka, les conservateurs voyaient un soutien de la population aux idéaux communistes, les indépendantistes refusaient ce référendum puisque les pays Baltes avaient déjà proclamé leur indépendance entre mars et mai 1990.

Mickael Gorbatchev était à l'initiative et un fervent défenseur de ce référendum. Sa politique de la pérestroïka était mise en place depuis 1985. On s'aperçoit que les pays centraux de l'Union (Russie, Ukraine, Biélorussie) ont manifesté un non plus prononcé que les autres pays.

Le même 17 mars 1991, un référendum constitutionnel supplémentaire était donné en Russie et dont la question était "Considérez vous nécessaire l'introduction du poste de président de la RSFSR, élu au suffrage universel ?". Ceci dans le cadre des dissensions entre Gorbatchev et Eltsine sur la gestion politique, le second reprochant au premier de ne pas être assez radical dans son projet de transformation. La population vote pour avec un soutien moins majoritaire que celui voulant préserver l'URSS.



Le 23 février 1991, un rassemblement en défense des forces armées de l'URSS et en soutien à l'intégrité de l'URSS a eu lieu sur la place Manezhnaya à Moscou. Selon les données de la police, environ 250 000 personnes ont participé au rassemblement. Selon d'autres données, le nombre de participants est de 600 000 à 800 000 personnes. L'événement a été organisé par les groupes parlementaires « Soyouz » et « Moscou ». 







Le lendemain, le 24 février 1991, un rassemblement massif des partisans de Boris Eltsine a eu lieu sur la place Manezhnaya. Le nombre de participants à ce rassemblement, selon diverses sources, variait entre 200 000 et 400 000 personnes. La manifestation a été organisée par le mouvement Russie démocratique.



2) Concernant l'économie

Une étude des données analysées par Georges Sokoloff nous permet d'éditer le tableau suivant.

Nous pourrons de prime abord remarquer que la plus forte croissance correspond à la période Stalinienne. Son successeur et contempteur Nikita Krouchtchev accuse une baisse de 8% du taux de croissance, la seconde plus forte baisse correspond à la période de Mikhaïl Gorbatchev avec une chute de 13%. 

C'est en 1985 que Gorbatchev a mis en place les réformes économiques de la pérestroïka. Ces réformes contrevenaient directement à la politique communiste de planification centralisée.

3) Les conséquences de la Glasnost et de la Pérestroïka

"Ils en sont revenus" : Les communistes c'est comme les oignons, ils ne reviennent pas tout simplement parce qu'ils ne sont jamais partis. Commençons par les pays qui se sont séparés de l'URSS avant sa fin officielle.

Préalable : La Loi sur la procédure de sécession de l'URSS a été validée par le soviet suprême de l'URSS le 3 avril 1990.

Analyse des pays Baltes :

Lituanie : 

Entre 1990 et 1992 le parti Sąjūdis est au pouvoir et soutient la privatisation des entreprises d'État, la libéralisation des prix et la transition vers une économie de marché. 

Les élections législatives d'octobre 1992 voient une chute de ce parti qui perd 61 sièges. Le parti démocratique du travail (ancien parti communiste) fait une percée et obtient 73 sièges.

Le programme du parti démocratique du travail visait à protéger les travailleurs et les groupes vulnérables pendant la transition économique. Il proposait de maintenir un système de sécurité sociale fort, avec des allocations chômage, des pensions de retraite et des soins de santé accessibles à tous.

L'élection présidentielle de 1993 confirme cette percée avec l'élection d'Algirdas Brazauskas. Ce parti fut dissous en 2001 suite à un déclin électoral et des scandales de corruption.

Estonie :

Le parti communiste fut interdit en Estonie tout comme en Lituanie. Cependant l'Estonie n'a
pas permis la création d'un parti de gauche descendant direct du parti communiste.

Lors de la fin de l’URSS en 1991, environ 30 % de la population de l’Estonie était russophone, majoritairement des immigrants ou descendants d’immigrants installés pendant les périodes soviétiques (1940-1941, puis 1944-1991).

La loi sur la citoyenneté de 1992 était basée sur le principe de la continuité juridique, selon lequel seuls les citoyens estoniens d'avant 1940 et leurs descendants étaient automatiquement considérés comme citoyens estoniens. Ce qui doit expliquer une participation plus faible à ces élections.

La politique de Mart Laar consistait en une privatisation massive s'appuyant sur les idées de Friedman. Les salaires ont chuté de 45 % en 1992, et l’inflation, bien que maîtrisée après la réforme monétaire, est restée élevée.

Selon son propre aveu "La confiance que les citoyens accordent à leurs dirigeants et le niveau de souffrance qu'ils sont prêts à endurer ont des limites. Le gouvernement a déclaré qu'il ne pouvait aider que ceux qui étaient prêts à faire quelque chose par eux-mêmes. Ce principe s'est avéré impopulaire, mais il a contribué à changer les mentalités."

Une élection présidentielle se tenait à la même période que l'élection législative. On remarque qu'Arnold Rüütel a obtenu le vote populaire majoritaire mais n'a tout de même pas été élu car le quorum de 50 % n'était pas atteint. 

Il a connu la même mésaventure en 1996 et fut finalement élu en 2001.

Lennart Meri, son rival, mettait l’accent sur une vision pro-occidentale et intellectuelle, tandis que Rüütel semblait plus ancré dans une continuité sociale et nationale.

Il a d'ailleurs fondé le Parti populaire conservateur estonien (Eestimaa Rahvaliit), qui combinait des valeurs conservatrices rurales avec une sensibilité sociale, plaidant pour une transition économique moins brutale et un filet de sécurité pour les groupes vulnérables (retraités, agriculteurs).

Lettonie

Les premières élections ouvertes ont eu lieu le 18 mars 1990. Le Front populaire letton a recueilli 131 députés, et le LKP (communistes) 57 députés.

Les affrontements de janvier 1991 ont conduit à la mort de 14 civils. La population lettone en a tenu Michael Gorbatchev pour responsable.

Le LKP a été déclaré anticonstitutionnel le 23 août 1991 et dissous le 10 septembre 1991. 

En 1993, les élection parlementaires furent suivies à près de 89%. Le premier parti élu fut un parti libéral avec 32 %, les deux autres partis élus furent des partis de gauche / centre-gauche  favorables à un État jouant un rôle protecteur pour éviter les excès d’une transition brutale au capitalisme.

Les premières années post-1991 ont vu l’effondrement des garanties sociales de l'URSS en raison de la crise économique (inflation de 950 % en 1992, chute du PIB de 34 % entre 1990 et 1992). 

La Constitution de 1922, garantissait dans son article 112 le droit à l’éducation, et les premières lois éducatives post-indépendance ont visé à préserver un accès universel à l’école publique. 

Cependant, la réduction des financements publics a conduit à des protestations dès 1992, notamment de la part d’enseignants et de parents, qui exigeaient que l’État continue de jouer un rôle actif.

La mise en place de politiques libérales a été sanctionnée par la population dès les élections suivantes où le parti de "La voie lettone" s'est effondré.


Géorgie :

Lors des premières élections ouvertes en 1990 le parti/coalition Table Ronde est arrivé premier. Le parti communiste est arrivé second. Les deux partis promettaient une indépendance vis à vis de l'URSS.

Durant une conférence de mars 1990, Zviad Gamsakhourdia s'opposait à l'idée d'une rupture directe et du retrait immédiat de l'armée soviétique. il préférait suivre la voie dite "lituanienne" consistant à remporter d'abord les élections puis se proclamer indépendant. Il fut suivi par plusieurs partis et forma la coalition "Table Ronde".

En novembre 1990, lors de la première session du Conseil suprême de la République de Géorgie, Zviad Gamsakhourdia a été élu à l'unanimité président du Conseil suprême.

L'élection présidentielle de mai 1991, Zviad Gamsakhourdia est confirmé au poste de président avec 87 % de suffrages exprimés.

Sur cette période de 1989 à 1991, la Géorgie qui proclamait son indépendance vis à vis de l'URSS la refusait à l'Ossétie du Sud. En novembre 1989, l'Ossétie demande à passer au statut de république autonome. C'est un refus de la Géorgie qui assiège Tskhinvali fin novembre 89.

En mai 1991 l'Ossétie du Sud annonce sa volonté de se séparer de la Géorgie et son souhait de fusionner avec l'Ossétie du Nord. La déclaration d'indépendance de l'Ossétie du Sud est faite fin décembre 1991.

Suite au putsch de Moscou d'août 1991, Gamsakhourdia accuse conjointement les Etats-Unis et la Russie de conspirer contre la Géorgie. Plusieurs de ses ministres démissionnent l'accusant de démagogie et totalitarisme. Gamsakhourdia interdit le Parti communiste fin août 1991 et fait révoquer le mandants des 64 députés communistes restants. En septembre, environ 200 journalistes se sont mis en grève pour protester contre la censure. À l’hiver 1991, il ne restait plus qu’une poignée de journaux indépendants. Les Etats Unis exprimaient leur inquiétude concernant les droits de l'Homme. 

L'opposition fait un coup d'état en décembre 91 ce qui conduit Gamsakhourdia à partir en exil jusqu'en 1993. Il est mort (a été tué ? suicide ?) en octobre 1993.

Arménie :

Le 23 août 1990 l'Arménie déclare son indépendance. Le 20 mai 1990 les élections au soviet Suprême portent les communistes en tête. 

La première élection présidentielle a eu lieu en octobre 1991. Levon Ter-Petrossian a remporté l'élection avec 83 % des voix pour 74 % de participation.

En décembre 90, Gorbatchev proposait d'organiser le référendum sur le maintien de l'URSS sur une base renouvelée.

Levon Ter-Petrossian refusa cette proposition a préféra organiser le référendum suivant en septembre 1991 (soit après l'échec du putsch de Moscou) " Êtes-vous d’accord pour que la République d’Arménie soit un État démocratique indépendant en dehors de l’URSS ?".

Avec une participation de 95 % la population valida le terme de ce référendum à plus de 99 %. 

Le 10 décembre 1991 a eu lieu un référendum "Êtes-vous d'accord pour que la République proclamée du Haut-Karabakh soit un État indépendant, qu'elle décide de manière indépendante de ses formes de coopération avec d'autres États et communautés ?". La population a validé à plus de 99 % cette proposition avec 82 % de participation.

Il faut faire une analyse du contexte historique entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Le Haut-Karabagh , région à majorité arménienne, était partie de la République socialiste soviétique d'Azerbaïdjan sous l'URSS. Dès 1988, des revendications d'autonomie puis d'indépendance émergent chez les Arméniens du Karabagh, qui ont demandé leur rattachement à l'Arménie. L' Azerbaïdjan refuse catégoriquement, ce qui entraîne des émeutes interethniques (pogroms de Soumgaït en 1988, Bakou en 1990).

Le 10 décembre 1991 , le Haut-Karabagh organise le référendum d'indépendance, boycotté par la population azérie. La guerre éclate à grande échelle en 1992 avec le bombardement de Stepanakert. Mai 1992, les Arméniens prennent Chouchi et ouvrent le couloir de Latchin. En 1993, les Arméniens s'emparent de sept districts azerbaïdjanais autour du Karabagh , provoquant l'exode de centaines de milliers d'Azéris. Une estimation de 485 morts civils est donnée pour les victimes azéries. Selon Helsinki Watch, des forces militaires azéries et russes étaient mêlées à la population lorsque les troupes arméniennes ont fait feu. 

La débâcle militaire de l'Azerbaïdjan dans la guerre du Haut-Karabagh conduit au coup d'état de 1993. Heydar Aliyev a été installé au pouvoir, puis confirmé par des élections controversées.

De l'influence néfaste de la politique de Gorbatchev : La Glasnost, en permettant la liberté d'expression et la critique ouverte, a révélé et exacerbé les tensions interethniques en URSS. En donnant une voix aux revendications nationalistes, elle a joué un rôle clé dans l'explosion des conflits interethniques à la fin des années 1980. 

Ces conflits ont non seulement contribué à l'effondrement de l'URSS, mais ont aussi laissé un héritage durable de tensions dans plusieurs régions de l'ex-Union soviétique.

L'incapacité du pouvoir soviétique à réformer l'État sans perdre son autorité et la perestroïka mal gérée ont conduit à la crise économique puis à la désintégration de l'Union des Républiques que pourtant la population appréciait.

4) L'évolution de l'appréciation des populations concernant le communisme

Russie : Au moment de l'effondrement de l'URSS, les premières élections législatives ont porté les libéraux au pouvoir. La Russie a connu une transition économique brutale vers le capitalisme, marquée par une hyperinflation, une chute du niveau de vie et une montée des inégalités. Le KPRF a été fondé en 1993 en tant que successeur du PCUS. Dirigé par Guennadi Ziouganov, il a rapidement émergé comme la principale force d'opposition au pouvoir libéral de Boris Eltsine.




Dès son accession au pouvoir en 1999, Vladimir Poutine a mis en place plusieurs stratégies pour réduire l'influence des communistes et empêcher leur retour au pouvoir. En récupérant les thèmes de grandeur nationale, d'opposition à l'Occident, du rejet des années 1990 et en se positionnant en héritier de l'URSS il a pu vider le KPRF de sa substance. 

Via des lois restrictives, les manifestations organisées par le KPRF ont souvent été interdites ou dispersées par la force, réduisant la capacité du parti à mobiliser son électorat. Des bureaux du KPRF ont été vandalisés ou fermés sous des prétextes administratifs.

Poutine a encouragé la création de faux partis d'opposition contrôlés, comme le Parti communiste de Russie (distinct du KPRF) ou le Parti des retraités , pour diviser l'électorat communiste.

La vision des Russes :

Plusieurs sondages depuis la fin de l'URSS ont été publiés pour voir l'appréciation de la population russe sur les anciens dirigeants et les différents évènements qui ont eu lieu.

En 2017, l'institut de sondage Levada a comparé l'appréciation des différents dirigeants russes dans son histoire. Les mieux perçus sont Lénine et Staline, les plus honnis sont Gorbatchev et Eltsine. Poutine est vu avec respect.




Un autre sondage, cette fois ci récurrent est posé en Russie sur l'effondrement de l'URSS. Que ce soit en mars 1992 ou en 2019 le résultat est similaire : 66 % de la population russe regrette l'effondrement de l'Union soviétique. Une version 2017 de ce sondage nous apprend que ce regret augmente dans les couches les plus âgées de la population. 


Le système économique reste l'une des raisons majeur du regret de l'URSS.



Ukraine : Comme en Russie, la transition économique a été difficile, avec une corruption endémique et des inégalités croissantes.


Dans les années 1990, le KPU bénéficiait d'un fort soutien parmi les personnes âgées, les travailleurs industriels et les habitants des régions orientales et méridionales de l'Ukraine, qui regrettaient la stabilité de l'ère soviétique. Traditionnellement, le KPU était soutenu par l'électorat nostalgique de l'URSS et russophone, notamment dans le Donbass et la Crimée.

Le parti des régions et le Bloc ont concurrencé le KPU par une proposition politique pro russe. 


Au début des années 2000, une nouvelle génération d'électeurs, moins attachée à l'héritage soviétique, a commencé à émerger. Ces électeurs étaient plus ouverts aux idées réformatrices et pro-européennes. La révolution orange de 2004 a marqué la polarisation d'un conflit entre deux fractions de la bourgeoisie ukrainienne, soutenues par des intérêts impérialistes rivaux (Iouchtchenko /Ianoukovitch).  La lutte entre ces factions ne concernait pas l'émancipation des travailleurs, mais le choix d'une dépendance soit envers l'Occident, soit envers la Russie. Le prolétariat n'a pas dirigé le mouvement , et aucune revendication socialiste ou de remise en cause du capitalisme n'a émergé. Le KPU ne s'est pas présenté à l'élection présidentielle de 2004, car il considérait que l'élection serait dominée par un affrontement entre les factions pro-européennes et pro-russes , et qu'il serait plus stratégique de soutenir Viktor Ianoukovitch plutôt que de participer directement à la compétition. 

La politique de décommunisation menée par les autorités ukrainiennes après la crise de l'Euromaïdan de 2014, visant à interdire la propagande et les symboles communistes et nazis. Les lois correspondantes ont été adoptées par la Rada le 9 avril 2015 et promulguées le 15 mai 2015.

La persécution contre les vétérans a continué en 2016, le journal des travailleurs est interdit en 2019. 

Plusieurs centres de sondages se sont penchés sur l'analyse des populations concernant l'URSS. En 2016 Spoutnik affirmait que parmi le 35-64 ans 60 % des Ukrainiens estimaient que la qualité de vie était meilleure en Union soviétique. En 2015, Pew Research Center affirmait que pour 37 % des Ukrainiens la fin de l'URSS était une mauvaise chose.  En 2005, Levada affirmait que 50 % des Ukrainiens regrettaient l'URSS. En 2021, un sondage effectué hors des régions de la crimée et du Donbass montrait que un tiers des ukrainiens regrettaient l'URSS.

Comme pour le sondage Levada en Russie, les plus âgées répondent positivement ainsi que les couches sociales les plus pauvres. 




La population a pu analyser la baisse de qualité de vie depuis la désintégration de l'Union Soviétique. 


5) Conclusion :


Pour Marx, l’effondrement d’un système ne signifie pas la fin de l’Histoire, mais une étape dans la dialectique : les conditions matérielles n’étaient pas pleinement réunies pour une société communiste mature, et cet échec refléterait une transition inachevée vers une société sans classes. Comme nous l'avons vu, la restauration capitaliste, a été orchestrée par les forces bourgeoises internes (oligarques et politiques) et externes (Etats Unis). Dans Le Manifeste communiste, Marx insiste sur le fait que les reculs sont inévitables dans la lutte des classes, mais que le mouvement prolétarien finit par progresser. 

Nous avons vu que l'histoire n'a pas balayé le communisme et que bien souvent les populations l'ayant vécu dans leur vie de tous les jours ne l'a pas rejeté, au contraire. 

C'est donc une étape dans le processus dialectique: la Chine actuelle montre une réussite tactique face à l'impérialisme, tout comme le parti communiste Vitenamien, Laotien ou Keralais qui nécessitent de développer leurs forces productives pour résister face à l'impérialisme capitaliste. Cuba se distingue par sa fidélité idéologique et sa résistance à l’impérialisme, il le paie avec un fort isolement.

Cette résilience face au capitalisme mondial montre l'adaptabilité dialectique du communisme. Il n'a pas été rejeté par les populations, il est passé par une nouvelle phase dialectique.

mardi 18 février 2025

Les endoxes de la droite

Je reprends ce blog pour répondre à un camarade de dispute qui me demandait de réfléchir à ce fil. Sa question portait sur le fait de savoir si un homme de gauche, ou se pensant comme tel, adhérait aux "endoxes" citées. Je me suis rendu compte que Twitter est un outil qui ne permet pas un échange serein, il s'agit plutôt de pulsion, de procès d'intentions. 

Endoxe 1 : 


L'histoire ancienne de notre nation est marquée par les Celtes, Romains, Francs, Visigoths, Burgondes, Vikings, la fuite des Huguenots. Puis l'arrivée des Italiens, Espagnols, Polonais, Belges. Enfin des Maghrébins, Africains subsahariens, Asiatiques, et d'Europe de l'Est.

Une étude de l’Inserm/CNRS menée en 2020 par Christian Dina, spécialiste en épidémiologie génétique, a montré que ces vagues migratoires se reflètent dans le génome actuel des Français. Les données génétiques confirment trois grandes vagues de peuplement :

Mésolithique : Les chasseurs-cueilleurs autochtones. Néolithique : Les premiers agriculteurs d'Anatolie arrivant par le sud-est. Âge du Bronze : Les pasteurs nomades de la steppe pontique (Yamnaya) arrivant par le nord-est.



Avec pourtant des différences régionales marquées par les barrières géographiques comme les grands fleuves.

Que ce soit les migrations germaniques entre le IVe et le VIe siècle (des centaines de milliers à 1 million de personnes), l'immigration italienne à partir du XIXe siècle (environ 4 million de personnes), polonaise dans les années 20 (1 million de personnes), espagnole dans les années 30 (500 000 à 1 million), les portugais fuyant Salazar dans les années 50 (1 million à 1,4 million), la première migration maghrébine des années 50 (2 millions), la subsaharienne des années 70 (1 million), puis les vagues de l'Est des années 200 000 (1 million). Ces différentes vagues n'ont pas fondamentalement modifié les populations en place.

Un béarnais était incapable de comprendre un flamand. En 1794, l'abbé Grégoire nous apprenait que 10 à 15 % de la population parle français couramment. Le ministre Victor Duruy publie une enquête montrant qu'un tiers des français parlent le français en 1863. Ce chiffre atteint 50 % avec la scolarisation obligatoire à la période de Jules Ferry. C’est sous la IIIe République que se généralise la notion des « ancêtres Gaulois », dans une volonté d’unifier des populations encore très diverses.



La construction progressive de la nation française ne s’est donc pas faite autour d’un ethnos homogène et stable, mais bien à travers sa diversité.

Ainsi : du XVe au XVIIIe siècle

Production : agriculture féodale contrôlée par la noblesse et le clergé Classes sociales : les ordres. L
es privilèges de la noblesse et du clergé assurent la stabilité du régime. 
Gestion des conflits : par l'absolutisme monarchique
L’incapacité à réformer le système économique et social par l'absolutisme monarchique a créé le déséquilibre qui conduisit à la première Révolution Française. Ceci donna lieu a une réorganisation de la production et des structures sociales.

S'il y a stabilité elle n'est que passagère car le déséquilibre vient de la lutte interne des rapports de production.

La naturalisation des rapports sociaux prônée par ceux qui considèrent l'ethnique avant la classe sociale tend à favoriser une organisation sociale immuable. Notre condition serait alors liée au destin et à la fatalité.

Il y a bel et bien eu des vagues migratoires en France durant toute son histoire. Cela n'a pas modifié la composition des différentes populations, cette diversité n'a pas contrevenu à la constitution de l'Etat centralisé français.

Endoxe n°2:



L'ethnos est le produit social des évolutions historiques des sociétés et les relations de classe qui traversent notre nation. Le demos (organisation politique) est influencé par les rapports économiques et de pouvoir qui sous-tendent l'organisation de la production. L'unité de l'ethnos et du demos peut être vu comme une manière d'empêcher l'émergence d'une conscience de classe, en prétendant que le peuple français est une entité homogène, et non un ensemble de groupes sociaux en lutte pour leurs intérêts.

Le nationalisme civique n'a rien de gentil. Il peut permettre aux élites politiques d'imposer une forme d'unité nationale qui, tout en niant les particularités ethniques, permet d'imposer l'ordre social existant (capitalisme, hiérarchie sociale, exploitation).

Pourtant le concept de Nation est brandi par les révolutionnaires du Comité de Salut Public. L'acte constitutionnel de la souveraineté du peuple de 1793 précise dans son article 7 "Le peuple souverain est l'universalité des citoyens français." Le pouvoir politique émane du peuple, la souveraineté appartient à l'ensemble des citoyens, sans distinction de classe, de richesse ou de naissance. La Nation n'est pas/plus une entité abstraite, mais une communauté concrète composée de tous les citoyens.

En 1871, les communards critiquent le nationalisme et non la Nation. C'est à l'occasion de la capitulation face à la Prusse qu'ils grondent et se proclament en mars 1871. Il s'agit de prôner une démocratie directe gérée par les citoyens dans des assemblées. Ils chantent la Marseillaise et s'organisent en garde nationale.

En élargissant la focale à d'autres endroits du monde on s'aperçoit que les forces patriotiques se refusant à la capitulation sont aussi communistes. Le 4 mai 1919 marque les révoltes des étudiants chinois contre l'humiliation de la perte de souveraineté. Parmi les figures de ce mouvement se trouvent les futurs fondateurs du PCC, eux mêmes poussés par les manifestants à se radicaliser.

En Chine le terme 誓死力争 signifie "Jurer de lutter jusqu'à la mort". Cela renvoie à notre propre devise complète : liberté, égalité, fraternité ou la mort.

Selon Arzalier, dans un monde dominé par le capitalisme financier transnational, les nations restent des repères nécessaires. Mais ce nationalisme peut devenir pathologique, surtout lorsqu'il est manipulé pour des fins réactionnaires ou fascistes par la bourgeoisie.

Endoxe n° 3:


Cette déclaration masque les causes  économiques de l'immigration et des difficultés d'intégration, en réduisant la question à une problématique ethnique ou culturelle. La manière dont les immigrés sont intégrés dans une société dépend de leur position dans le système économique. Par la division du travail les immigrés sont souvent employés dans les secteurs les moins qualifiés.



Chez les travailleurs musulmans, la religion peut offrir des mécanismes de soutien social et communautaire essentiels dans un contexte de marginalisation. Dans la "Contribution à la critique de la philosophie du droit de Hegel" Marx souligne que la religion est un moyen pour les opprimés de trouver un réconfort illusoire face à leurs souffrances matérielles. 

La pratique religieuse peut devenir un acte politique. La religion, en tant qu'instrument d'identité communautaire, joue un rôle important pour aider ces travailleurs à affronter la stigmatisation et la discrimination qu'ils subissent. Lénine montre dans "De l’attitude du parti ouvrier à l’égard de la religion" que la lutte directe contre le religieux n'a fait que raffermir le cléricalisme militant.




Plusieurs universitaires chercheurs notent une augmentation de la pratique religieuse des français musulmans depuis plus de trente ans : Gilles Kepel,  Franck Frégosi, Nonna Mayer. Le sociologue Samir Amghar et l'antrophologue Florence Bergeaud-Blackler parlent d'influence salafiste et frériste. Pour Samir Amghar l'augmentation de la pratique religieuse est liée à une quête d'identité des plus jeunes et à une réaction aux discriminations ou aux débats publics sur l'islam.

Les facteurs internes (incapacité des gouvernements capitalistes) et externes (influence des extrémistes religieux portés par une globalisation) seraient donc à l'origine de l'augmentation de la pratique religieuse. 

Cette pratique est analysée comme étant un instrument de réaction aux discriminations subies.

Cependant, comme le nationalisme, cet instrument va diviser les travailleurs entre eux, en renforçant des fractures culturelles qui peuvent freiner la lutte contre le système d'exploitation.  Le véritable défi pour les travailleurs musulmans réside dans leur capacité à transformer cette solidarité religieuse en une solidarité de classe. 

Un pays capitaliste ne pourra pas résoudre cette contradiction et appellera forcément à exclure ceux dont pourtant il a tiré de la plus value. La régulation du marché du travail vise à attirer une main-d'œuvre bon marché et donc renforce la contradiction qui enferme les travailleurs dans leur identité religieuse. 

Ce discours présenté dans l'endoxe n°3 ne permet aucune émancipation, ni possibilité de mobilité sociale des travailleurs français musulmans.

Le premier ministre Polonais (parti politique PIS) affirmait en 2018 " Nous n'accepterons pas de migrants du Moyen-Orient et d'Afrique en Pologne". 





Endoxe n° 4 : 


En 2016, le gouvernement hongrois a proposé un référendum sur sur la relocalisation de migrants par l'Union européenne. Il a été invalidé car le quorum des 50 % n'était pas atteint. A l'appel de l'opposition le boycott et le vote nul l'a emporté. 

Malgré les propos et positions de Victor Orban sur le sujet, la tendance globale montre une augmentation de l'immigration étrangère en Hongrie, ce qui contraste avec l'émigration continue et croissante des citoyens hongrois. 


Les nations et les institutions, telles qu'elles existent dans les sociétés capitalistes, servent à protéger les intérêts de la bourgeoisie et à perpétuer l'exploitation des classes laborieuses. En invoquant la "légitimité" de ces structures, cela occulte leur rôle dans la reproduction des inégalités sociales et économiques. 

Ainsi après la guerre de sécession aux Etats Unis les Black Codes et le travail sous contrat ont limité les droits des Afro-Américains, assurant une main-d'œuvre peu coûteuse pour les propriétaires de plantations, maintenant ainsi les intérêts économiques de la bourgeoisie sudiste. Jusqu’en 1960, les lois Jim Crow ont maintenu un système de ségrégation raciale qui limitait les opportunités économiques et sociales des Afro-Américains. La bourgeoisie sudiste a bénéficié de ce système, qui garantissait une main-d’œuvre bon marché et divisait les travailleurs selon des lignes raciales.

La notion de racket moral est posée ici pour éviter de traiter de la notion de solidarité de classe. La division entre "nous" et "eux" (les étrangers) est un outil utilisé par la bourgeoisie pour affaiblir la conscience de classe et empêcher l'unification des travailleurs contre leurs exploiteurs communs. 

Notre camarade Georges Marchais a précisé "La présence en France de près de quatre millions et demi de travailleurs immigrés et de membres de leurs familles, la poursuite de l’immigration posent aujourd’hui de graves problèmes. Il faut les regarder en face et prendre rapidement les mesures indispensables. Ce qui nous guide, c’est la communauté d’intérêts, la solidarité des travailleurs français et des travailleurs immigrés. Tout le contraire de la haine et de la rupture."

La question n'est pas de savoir si nous sommes en droit ou pas de refuser des individus dont nous ne voulons pas, la question est de savoir dans quel cadre politique nous nous situons et ce que cela a comme implication pour notre classe sociale.

Le programme commun de 1972 prévoit un choix dans le nombre d'entrées de migrants, mais non pas en fonction des besoins économiques du patronat puisque le dumping souhaité par le patronat est annihilé de fait par la régularisation. D'un point de vue marxiste, ce programme est une tentative de protéger la classe ouvrière de l'exploitation en assurant que tous les travailleurs, qu'ils soient immigrants ou non, sont traités équitablement, ce qui renforce la lutte des classes contre les intérêts bourgeois.
La droite nationale ne propose pas cela. Elle acte, parfois encourage, la concurrence entre les travailleurs et puis souhaite la résoudre en rejetant celles et ceux dont elle a tiré les fruits. 

Le dispositif du retour du million d'immigrés de Lionel Stoléru prévoyait un octroi de 10 000 francs d'aide au retour dans le pays d'origine. L'objectif premier était de renvoyer les algériens. Or un article du Monde nous apprend que l'objectif ne fut pas atteint en nombre ni en catégorie de population.

La première ministre italienne Georgia Meloni promettait en 2022 l’instauration d’un blocus naval autour de l’Italie pour empêcher les migrants d’atteindre l'Italie. En 2018 moins de 31 000 travailleurs temporaires ont été autorisés en Italie chaque année, le gouvernement en a finalement planifié plus de 450 000 sur trois ans d'ici 2025.

Reste l'immigration irrégulière, elle même admettait en 2023 (alors victime d'un canular téléphonique) que l'arrêter était impossible en raison de l'ampleur du phénomène. En septembre 2023 elle admettait un résultat qui n'était pas à la hauteur de ses espérances. 

Fin octobre 2024 l'Italie publiait des données affirmant que l'immigration illégale enregistrait une baisse de 2/3.  Bruno Retailleau affirmait que ce sont les accords conclus avec la Tunisie et l’Egypte qui ont permis à l’Italie de diminuer l’immigration illégale. Si effectivement Meloni a fait plusieurs visites et accord avec la Tunisie et la Syrie ce n'était pas une première. En 2010 des accords étaient déjà signés avec la Lybie. D'autres accords signés en 2017 avec l'aval de l'UE ont montré les mêmes abus sur les migrants que les mafias pourraient faire. Le pouvoir Italien est d'ailleurs prêt à fermer les yeux sur la fuite d'un de ces tortionnaires pour sauver ces accords.

Dans son endoxe Gugus Bontaquin énonce "L'humanisme et l'universalisme bien compris veulent donc qu'on s'occupe d'abord des siens avant de s'occuper des autres.". Pourtant le plan Mattei qu'elle propose en janvier 2024 prévoit 5,5 milliards d'euros d'investissements pour le continent africain. 

Elle rejoint en cela le plan européen de 150 milliards d'euros. Les six piliers du plan Mattei sont : l'éducation et la formation professionnelle, la santé, l'accès à l’eau, l'énergie et l'agriculture. L’objectif officiel est de sécuriser les approvisionnements énergétiques de l’UE tout en aidant les pays africains à se développer de manière accélérée afin de freiner les flux migratoires. 

Fin 2023 force leur était de reconnaître l'échec de la politique uniquement restrictive puisque l'arrivée de migrants avait augmenté de 50%. Le naufrage de Cutro fin février 2023 conduisait à la mort de 94 personnes. En 2022, Meloni disait dans un discours au parlement : 

L'amorce du Plan Mattei était lancée, restée floue pendant plusieurs mois elle s'est trouvée accélérée en janvier 2024.

Pour autant l'affiche ne correspondra peut être pas au spectacle. En 2017, ENI a été accusé d'avoir versé des pots-de-vin à des responsables ivoiriens pour obtenir des droits d'exploration pétrolière au large des côtes. Le même scandale se retrouve au Nigeria ou au Congo-Brazzaville

Ainsi la politique capitaliste ne permettra toujours pas à ces pays d'être souverains puisqu'ils ne seront pas producteurs d'énergie mais laisseront la gestion à des pays qui de fait empêcheront la véritable auto détermination d'un peuple.

La première ministre Meloni affiche donc une façade promettant une action inverse de l'endoxe n°4 mais dont les actions ne modifieront pas la trame de fond qui conduit à ces migrations.

Lénine nous enseigne que "le capital financier est une force si considérable, on peut dire si décisive, dans toutes les relations économiques et internationales, qu’elle est capable de subordonner même les États jouissant d’une indépendance politique complète."

Rosa Luxembourg ajoute "qu'il ne s'agit pas, pour le grand capital financier, de s'assurer des ressources en matières premières, mais de se réserver des domaines d'investissement privilégiés dans des pays industriellement peu développés, où l'aide de l'État, le bon marché de la main-d'œuvre, etc., garantissent un « super-profit »."

S'il faut répondre à cette endoxe, on pourra ajouter qu'il ne s'agit pas de moralité mais justement d'efficacité. Si "les produits moraux les plus stables, élevés et positifs sont ceux qui bénéficient le plus longtemps au plus grand nombre" alors il nous faut logiquement dénoncer l'exploitation impérialiste de ces pays qui conduisent logiquement à la migration des populations.

Endoxe n° 5

Le racisme, le fascisme, la discrimination et le sexisme ne sont pas simplement des catégories morales, mais des phénomènes sociaux, politiques et historiques qui s'enracinent dans des structures de pouvoir. L'accord de la réflexion se situe dans le fait de dire que "les droits individuels ne sont pas l’alpha et l’oméga."

Mais justement traiter ces catégories uniquement sous l'angle moral pose problème, car cela réduit ces phénomènes à des comportements individuels et à des jugements de valeur, plutôt qu'à des systèmes de domination et d'exploitation structurés .

Le racisme n'est pas seulement une attitude individuelle immorale, c'est un système de hiérarchisation sociale basé sur la race (historiquement lié à l'esclavage, à la colonisation et aux politiques ségrégationnistes). Le racisme est le produit de la contradiction de l'exploitation des peuples ou la division raciale est justifiée pour l'exploitation et diviser la classe ouvrière.

Le fascisme tel que noté n'est pas une catégorie morale mais une doctrine politique née de Mussolini qui lui même a tiré ses fondations de Tite Live. Dans "Ab Urbe condita libri" ce dernier décrit comment Agrippa Menenius réussit à ramener la paix en utilisant la fable du corps humain. 


D'ici Mussolini tire la société corporatiste et montre l'organicisme social. La société (le corps humain) ne se portera bien que si tous les organes restent à leur place. L'objectif est d'éteindre toute lutte de classe.


Le sexisme est un système qui opprime les femmes et les personnes non conformes aux normes de genre. Il est lié à la division patriarcale du travail et à la reproduction de la force de travail dans le capitalisme. Dans "la famille et l'Etat communiste" Alexandra Kollontaï montre comment l'Etat peut permettre l'émancipation par la décharge de la responsabilité sur le seul individu.

Le peuple n'est pas une entité unifiée et transcendante, mais une réalité traversée par des contradictions de classe. Dans la "Critique de l'Économie politique" Marx analyse que ". Le mode de production de la vie matérielle conditionne le processus de vie social, politique et intellectuel en général. Ce n'est pas la conscience des hommes qui détermine leur être ; c'est inversement leur être social qui détermine leur conscience." 

Ainsi, les conditions économiques oppressives et les politiques coloniales au Vietnam ont mené à une résistance croissante qui a non seulement visé à se libérer de l'oppression coloniale mais aussi à forger une identité nationale. L'occupation française a culminé dans la guerre d'Indépendance, où la lutte pour la survie et l'indépendance a forgé une conscience nationale extrêmement forte. Les atrocités, les privations, et la lutte commune contre un ennemi commun ont renforcé l'identité vietnamienne, avec le Việt Minh glorifiant cette conscience "Pour mener à bien la tâche de libération nationale, il faut appliquer la méthode d'appel la plus urgente, pour réveiller l'esprit national du peuple."

Les frontières se sont pas respectées dans le capitalisme, surtout dans sa phase impérialiste, lorsqu'il s'agit de conquérir des marchés ou d'exploiter une main-d'œuvre bon marché. En revanche, les frontières sont souvent utilisées pour contrôler la circulation de la force de travail et maintenir les travailleurs dans un état de précarité.

Ainsi la première mandature Trump n'a pas supprimé l'ALENA mais l'a transformé en un nouvel accord USMC. L'accord a ouvert davantage le marché mexicain aux produits agricoles américains, notamment le lait, les œufs et la volaille, permettant aux agriculteurs américains de conquérir un marché plus large avec moins de barrières tarifaires ou non tarifaires.

L'histoire et la culture sont le produit des luttes sociales et ne sont pas des blocs figés. 

Les luttes féministes ont redéfini l'histoire en luttant pour le suffrage féminin, l'égalité des droits, changeant ainsi la perception de la place des femmes dans l'histoire. Le droit de vote pour les femmes, montre comment la lutte sociale a remodelé l'histoire. 

La culture a été influencée par ces mouvements avec des changements dans la littérature, , des histoires de lutte pour l'égalité, et une critique des rôles de genre traditionnels.

Cette lutte est continuelle : le Save Act prévu par les Républicains des E.U dans sa mouture actuelle peut contrevenir au droit de vote des femmes mariées.

La morale n'est jamais absolue, mais historiquement et matériellement déterminée. Les idées de la classe dominante sont, à chaque époque, les idées dominantes nous dit Marx. Durant l'Europe Médiévale, la morale se justifiait dans la hiérarchie sociale où le clergé et la noblesse possédaient la majorité des terres et des pouvoirs. Pratiquer l'usure était contraire à l'ordre naturel et moral, c'est devenu une des clés économiques dans le capitalisme.


En revanche, l'inquisition et la persécution religieuse n'est plus encouragée sur notre sol pour protéger la foi et l'ordre social. 

Endoxe n° 6 :


L'accord se situera dans la fétichisation du droit ou de l'Etat comme on pourrait fétichiser la marchandise. Le droit n'est pas une entité abstraite ou indépendante, mais un outil qui évolue en fonction des rapports de force sociaux et des luttes de classes. On pensera naturellement au droit du travail et notamment au travail des enfants qui n'est plus légal sur notre sol mais pourtant exploité ailleurs notamment au Congo.

Le désaccord se situera dans les propos concernant la naïveté liée à l'utilisation des textes de la DUDH ou la Convention relative au statut des réfugiés. 
 
Ces textes sont nés d'un contexte historique particulier, la fin de la seconde guerre mondiale. 

La DUDH n'a pas de caractère juridiquement contraignant en soi. En revanche, la Convention relative au statut des réfugiés est un texte juridiquement contraignant. Le Protocole de 1967, supprime la référence géographique et élargi les protections aux réfugiés dans le monde entier. L'article 44 de la Convention prévoit que l'État signataire peut dénoncer la Convention en notifiant sa décision au Secrétaire général des Nations Unies. 

La Hongrie, l'Italie ou la Pologne sous le gouvernement du PIS n'ont pas dénoncé ces textes et ont pourtant mis en place des politiques restrictives ou parfois qui externalisent leurs frontières en niant la souveraineté d'autres Etats.


Cette politique était pourtant encouragée par Ursula Von Der Leyen.

La population Italienne ne souhaite pas poursuivre cette externalisation.

Comme nous le constatons ici encore la question n'est pas dictée par la morale mais par l'efficience.

Endoxe n°7 :

Marc Vanguard ne crée pas de données, il fait des infographies à partir de données qui sont publiées directement sur les sites gouvernementaux. Le terme générique "immigration extra européenne" reste flou. 

Gugus Bontaquin propose de ne pas spéculer sur les origines de la criminalité et préfère se concentrer sur l'expulsion de l'immigration extra européenne. 

Les deux lignes rencontrant la plus forte augmentation sont les violences sexuelles et les viols et tentatives de viols. Dans les deux cas, la ligne qui rencontre la plus forte augmentation sont les européens hors UE.


Les deux lignes rencontrant la plus forte baisse sont les vols violents avec sans arme et les vols avec armes. Dans ces deux tableaux tout n'est pas en baisse, les ressortissants d'Afrique enregistrent une hausse de 12% concernant les vols avec arme, et encore 12 % dans les vols sans arme. 





La criminalité n'est pas un phénomène naturel ou individuel, mais le résultat des conditions socio-économiques. Une analyse du ministère de l'Intérieur en 2015 a montré que les cambriolages de logements sont plus fréquents dans les communes où les revenus sont très élevés, où la proportion de personnes sans diplôme est importante, et où la population est particulièrement jeune. 

Le trafic de drogues est estimé à plus de 3 milliards d'euros par an en fourchette basse, le double en fourchette haute. Cette économie souterraine prospère dans des quartiers marqués par la pauvreté et le chômage, ce qui empêche une vie correcte des habitants qui parfois sont empêchés de sortir ou de rentrer.

Selon l'analyse de Fabrice Rizzoli dans le journal Causeur les narcotrafiquants exploitent ces conditions socio-économiques défavorables, la promesse d'un argent facile, totalement détaxé et rapidement accessible permet l'augmentation du phénomène.

Les réseaux de trafic exploitent souvent les banlieues pour la logistique et la distribution, profitant de la proximité avec les grandes villes pour alimenter le marché urbain. Cette proximité facilite le déplacement rapide des substances vers les zones de forte demande.

Cette drogue n'est pas produite en France, elle arrive de l'extérieur. Il est dommage que dans son endoxe la fermeture des frontières ne soit pas évoquée pour ce cadre.


La place de la mafia n'est pas une  surprise. C'est une puissance qui fait fi des frontières et de la souveraineté des nations.


Fabrice Rizzoli fait plusieurs propositions : le gel / confiscation des avoirs mal acquis, rendre ces confiscations définitives, l'allocation de ces avoirs à des associations, la réflexion autour du statut du repenti (notamment pour la famille), la prise en compte des victimes pour qu'elles ne tombent pas dans l'oubli. Il propose de prendre l'Italie comme exemple.

Il est intéressant de faire le lien entre cette endoxe et la précédente puisqu'elle parle d'OQTF. Il serait donc important de savoir si les personnes mise en cause et de nationalité étrangère sont concernées. 

Les différents cadres de couleurs marquent les mandatures de Chirac, Sarkozy, Hollande et Macron.


On remarque dans tous les cas une grande différence entre les OQTF prononcées et les OQTF exécutées. Un rapport de la cour des comptes montre que devant ce constat de difficulté à faire exécuter les obligation de quitter le territoire, logiquement la force publique se concentre sur celles qui concernent les menaces.


Le rapport montre que les obligations de quitter le territoire sur les autres pays européens ne sont pas de cette mesure. La France obtiendrait de meilleurs résultats dans le nombre de départs effectifs que l'Italie selon les chiffres de 2022.


Pourtant le rapport note une difficulté pour les personnels en charge "Entre 2017 et 2022, le nombre d’OQTF a augmenté de 60 % alors que les effectifs préfectoraux chargés de l’éloignement et du contentieux n’ont crû que de 9 %." Cette très grande différence entre la délivrance et l'exécution d'une obligation de quitter le territoire nuit fortement à la crédibilité de l'Etat selon la cour des comptes.

L'une des difficultés tient dans le fait que les documents d'identité des personnes ont disparu (ou ont été détruits), les laissez passer consulaires sont refusés par le pays d'origine, les vols commerciaux utilisés pour les retours sont une dernière étape de blocage. Le rapport préconise de centraliser la procédure de demande de laissez-passer consulaires, sauf exception, pour améliorer les relations avec les consulats et le taux de succès des demandes.

Elle recommande pourtant de ne pas abandonner les éloignements forcés "plus les éloignements forcés sont nombreux, plus les étrangers en situation irrégulière sollicitent l’aide au retour volontaire, car la menace d’un éloignement forcé est crédible."

Dans tous les cas le rapport de la cour des comptes ne parle pas de clémence, mais de surcharge, d'éclatement des services, de réorganisation.

Endoxe n°8 :


La droite traditionnelle défend les intérêts économiques et politiques de la bourgeoisie libérale, tandis que l'extrême-droite s'adresse davantage aux fractions de la bourgeoisie réactionnaire et aux classes moyennes en déclin. Le point commun réside dans la division de la classe des travailleurs pour maintenir le pouvoir de la bourgeoisie. 

L'extrême-droite parle aux classes moyennes et à la petite bourgeoisie, qui se sentent menacées par les crises économiques. Ces groupes sont séduits par des discours nationalistes et protectionnistes. En décembre j'avais tenté de répondre sur ce qu'il y avait encore d'extrême droite dans le programme du Front National.

Ce qui différenciera la droite et l'extrême droite est effectivement degré d'adhésion aux valeurs réactionnaires et autoritaires. Ce qui les rassemblera c'est la volonté acharnée de protéger le système capitaliste.

La lecture de Jacques Ellul nous apprend que non seulement nous ne devons pas différencier, mais qu'en plus nous devons faire une filiation de l'un à l'autre. Ce sont les politiques de la droite libérale et leurs échecs qui enfantent les crises économiques et sociales. Ces contradictions nées de l'organisation capitaliste permettent l'émergence et la puissance accrue de l'extrême droite. 

Les populations ayant historiquement baigné dans une organisation socialiste comme l'ex RDA sont bien moins enclines à supporter les contradictions du capitalisme. Elles se tournent donc vers les forces réactionnaires (carte à droite 2025) qui promettent une sauvegarde du système actuel malgré le fait qu'elles reconnaissent que le système socialiste était une bonne chose (carte à gauche 1994). Spiegel nous apprend qu'en 2009 57 % des Allemands de l'Est considéraient la période communiste comme une bonne période.





L'extrême droite, selon Ellul, est donc l'enfant de l'échec de la droite et des sociaux-démocrates, ces derniers s'étant ralliés au néolibéralisme. La différence de degré notée dans le message d'origine s'explique par le fait que cette radicalité vise à sauvegarder un système capitaliste qui, par ses contradictions internes (surproduction, exploitation, financiarisation), continue à créer les crises dont il se nourrit. 

De nos jours, le Front National se targue d'avoir une majorité d'ouvriers parmi ses électeurs. C'est le cas : il est devenu un parti de masse, profitant pleinement d'un discours anti-élites et anti-système, tout en critiquant la mondialisation et en défendant une protection sociale nationale. Cependant, son électorat n'est pas majoritairement composé d'ouvriers. 


De plus, le journal Cnews nous apprend que 
2/3 des électeurs du FN ne le sont pas par adhésion idéologique mais par opposition aux autres partis. C'est le seul parti dans ce cas.


Comme l'analyse le journal, cela s'explique par la désillusion croissante envers les partis traditionnels, incapables de proposer une alternative crédible aux crises sociales et économiques. Pourtant, derrière son discours populiste, le FN défend souvent des politiques économiques libérales (la suppression de la CFE est une mesure partagée avec les macronistes)  qui ne bénéficient pas aux classes populaires, révélant une contradiction fondamentale entre son discours et ses actions.