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dimanche 22 juin 2025

La baisse tendancielle du taux de profit : moteur des contradictions du capitalisme et de l’exploitation migratoire

Dans le cadre du capitalisme, la baisse tendancielle du taux de profit  agit comme un moteur puissant de l’exploitation, notamment à travers le recours à une main-d’œuvre migrante. 

Ce phénomène, théorisé par Marx, repose sur une contradiction fondamentale du mode de production capitaliste : l’augmentation de la composition organique du capital, c’est-à-dire une part croissante de capital constant (machines, infrastructures) par rapport au capital variable (force de travail humaine), réduit la part de plus-value générée, puisque seule la main-d’œuvre vivante produit de la valeur nouvelle. 


Cette dynamique pousse les entreprises, de la petite TPE à la multinationale, à chercher des moyens de compenser cette baisse, souvent au détriment des travailleurs les plus vulnérables. Au départ l'élargissement à la famille du travailleur, puis au travailleur migrant considéré par un capitaliste nationaliste comme un clandestin.

Livre III - 1865




Le marché du travail se négocie au bénéfice de la bourgeoisie via l'automatisation, les contrats précaires et l'utilisation stratégique de l'immigration. Cela confirme la vision de Marx : le capitalisme exige une main-d'œuvre flexible, prête à être mobilisée ou licenciée selon les "caprices du marché". 

Ces pratiques maintiennent une réserve de travailleurs précaires, utilisés pour maximiser les profits tout en limitant les protections sociales. Cette exploitation se retrouve dans toutes les strates des capitalistes, de la plus petite à la plus grande entreprise.

Les TPE : une dépendance au travail vivant et à l’exploitation informelle


Les très petites entreprises dans les secteurs de la restauration, du BTP ou de l’agriculture saisonnière, dépendent fortement du travail vivant, car elles investissent peu dans les machines. Cependant, elles subissent une pression concurrentielle intense qui réduit leurs marges. Pour contrer la baisse tendancielle du taux de profit, elles se tournent souvent vers une main-d’œuvre migrante précaire, comme des travailleurs sans-papiers ou des saisonniers, payés en dessous des minima légaux ou "au noir".

Selon un rapport de l’INSEE 40 % des employés de l’hôtellerie et de la restauration sont étrangers et 50 % des cuisiniers. Sur l’ensemble de la France, ils représentent respectivement 19,3 % et 22 % de ces métiers, selon la Dares. Le journal Le Monde nous apprend que 700 000 travailleurs seraient en situation irrégulière. La situation créant même un trafic d'identité.



Les PME : entre mécanisation et précarisation


Les petites et moyennes entreprises, comme celles du textile, de la logistique ou de l’agroalimentaire, adoptent une stratégie différente. Elles investissent davantage dans des machines, ce qui augmente leur capital constant, mais elles restent dépendantes d’une main-d’œuvre nombreuse. Pour compenser la baisse de leurs profits, elles recourent à deux pratiques principales : la flexibilisation de l’emploi et la délocalisation partielle.

Les PME investissent dans des machines ce qui augmente leur capital constant, mais restent dépendantes d’une main-d’œuvre nombreuse. Les PME textiles investissent dans des machines à coudre automatisées (brodeuses numériques), mais la coupe, l’assemblage et la finition restent manuels. L’investissement dans des brodeuses numériques augmente le capital constant, réduisant la part du capital variable (main-d’œuvre) et contribuant à la baisse tendancielle du taux de profit. Les PME contrebalancent cela en maintenant une main-d’œuvre manuelle flexible pour les tâches non automatisées, réduisant ainsi les coûts salariaux.
Les abattoirs ou les conserveries utilisent des machines de tri (robots de découpe), mais dépendent d’ouvriers pour l’emballage et le contrôle qualité. Ces tâches nécessitent une main-d’œuvre humaine pour leur précision et leur flexibilité, surtout dans les PME car l’investissement dans des machines ultra-spécialisées est limité. Ainsi, le journal Le Parisien nous apprend qu'en 2013 les abattoirs Gad à Josselin employaient du personnel Roumain en faisant du dumping social.

L'automatisation des entrepôts de PME permet d’accroître la productivité et la sécurité, notamment grâce à l’usage de transstockeurs ou de chariots automatisés, mais la préparation des commandes est encore souvent réalisée manuellement, car elle demande une adaptation rapide aux variations de la demande. Une étude de Lucas Tranchant nous apprend que jusqu'à 70% des travailleurs sont sous statut d'intérimaire. Cette étude confirme que les employés intérimaires immigrés sont souvent déclassés par rapport à leurs collègues.

"L'intérim agit comme un vecteur de disqualification professionnelle"

Dans ces secteurs le travail humain reste donc important. Pour tenter de corriger la baisse tendancielle du taux de profit, les PME ont par conséquent deux recours : la flexibilisation de l'emploi via les contrats d'intérim ou les CDD proposés à une main-d’œuvre migrante.

Ou encore la délocalisation partielle via une sous-traitance à des ateliers qui exploitent une main-d’œuvre à bas coût. Si l'entreprise ne peut pas profiter de la migration humaine alors elle profitera de la migration des capitaux.


Les grandes entreprises : mécanisation et délocalisation


Les grandes entreprises, fortement mécanisées, ont une composition organique du capital élevée, avec des chaînes de production automatisées et une robotisation poussée. Cela réduit la part de travail vivant, et donc la production directe de plus-value.

Pour contrer la baisse tendancielle du taux de profit, elles adoptent deux stratégies principales :
- la délocalisation vers des pays à bas coûts : en transférant une partie de la production dans des pays où les salaires sont très bas, la valeur de la force de travail est réduite, ce qui permet d’augmenter la plus-value relative extraite.

- la sous-traitance : en externalisant certaines activités vers des sous-traitants souvent moins réglementés, les grandes entreprises peuvent se décharger des responsabilités sociales et salariales, tout en maintenant une pression forte sur les coûts.

Un exemple frappant est celui de VINCI, une entreprise française de construction, accusée d’exploiter des travailleurs immigrés sur les chantiers au Qatar pour la Coupe du monde de 2022. Ces travailleurs, selon un rapport d’Amnesty International, étaient soumis à des journées de 12 heures avec des salaires impayés et des conditions de vie indignes).


Il est à noter que le Qatar a appliqué la politique de remigration chère à Renaud Camus pour ces travailleurs exploités dont il a extrait la plus value. 

La surpopulation relative est une masse de travailleurs excédentaires, produits par l’accumulation capitaliste, qui ne sont pas immédiatement absorbés par le processus de production. Cette population "flottante" est maintenue dans une précarité structurelle, servant à discipliner la classe ouvrière en maintenant les salaires bas et en assurant une main-d’œuvre disponible pour le capital. Renaud Camus légitime donc un phénomène structurel du capitalisme en le reformulant dans un cadre identitaire et nationaliste.




Les grandes entreprises comme Levi’s, Zara ou H&M externalisent une grande partie de leur production textile au Bangladesh, où les usines emploient majoritairement des travailleurs (migrants des campagnes vers les villes) dans des conditions précaires. Malgré les scandales liés aux effondrements d’usines, ces marques continuent de profiter de la main-d’œuvre bon marché pour maximiser ses profits.

En 2005 l'entreprise Irish Ferries a tenté de remplacer ses employés irlandais par des travailleurs est-européens moins bien payés, ce qui a déclenché des manifestations massives de 100 000 travailleurs à Dublin. 



Les grandes entreprises profitent donc de la vulnérabilité des migrants pour maximiser leurs profits, leur installation dans un pays crée des déracinements entre pays, parfois même au sein du pays.

Les multinationales : une exploitation transnationale


Les multinationales, disposant d’un capital financier colossal, opèrent à une échelle transnationale et font face à des formes de concurrence variées : concurrence par les coûts, par l’innovation, ou encore par la formation de monopoles.

Grâce à leur dimension transnationale, elles disposent d’un pouvoir économique qui dépasse celui de nombreux États. En 2024, le chiffre d’affaires d’Apple (391 milliards de dollars) dépasse le PIB de pays comme la Colombie (363 milliards). Le chiffres d'affaire d'Amazon était de 637 milliards, soit plus que le PIB de la Belgique ou du Danemark. Les dépenses de lobbying des GAFAM atteignent 100 millions d'euros. C'est le premier groupe d'influence à Bruxelles.

Pour compenser la baisse tendancielle du taux de profit, elles adoptent des pratiques comme l’évasion fiscale, la compression salariale, ou la précarisation accrue des conditions de travail.

En Allemagne, Tesla emploie des travailleurs détachés polonais ou roumains dans son usine de Berlin, payés 30% de moins que les salariés allemands.


Une enquête du
Guardian en 2024 a révélé qu’Amazon UK sous-traite à des sociétés écrans qui exploitent des livreurs migrants espagnols, sous payés, en collaboration avec des réseaux mafieux.

Une autre enquête du Telegraph de mai 2025 montre comment les travailleurs illégaux sont embauchés par les plateformes de livraison. 


Le marché du travail évolue en un marché de traite humaine où les migrants deviennent un rouage du marché. Ce rouage s'actionne entre les plateformes de livraison et les gangs criminels.


En finançant l'hébergement des migrants exploités par les plateformes, le gouvernement anglais valide le circuit d'exploitation migratoire et illustre le concept de "privatisation des profits". C’est un subventionnement indirect du capital par l’État, dans un contexte de capitalisme néolibéral.

Le minimum de subsistance est encore réduit puisque ces travailleurs n'ont pas a payer leur hébergement, les plateformes de livraison n'ont donc pas à augmenter les salaires et tirent leur plus value de l'exploitation des travailleurs irréguliers. Le statut irrégulier ou précaire des migrants joue ici un rôle central : il permet leur exploitation en dehors des normes légales du salariat.


Les multinationales exercent également une pression sur les États pour obtenir des politiques migratoires favorables. Un exemple notable est l’initiative FWD.us, soutenue par Mark Zuckerberg et Bill Gates depuis 2013, qui milite pour l’élargissement des visas H-1B aux États-Unis afin de garantir un accès à une main-d’œuvre qualifiée à moindre coût . La logique capitaliste d'entreprises en quête de profit perpétuel pour leur survie, continue d'instrumentaliser les migrations en 2025.

C'est cette logique qui a conduit a une dispute interne entre les soutiens de Donald Trump, d'un côté la volonté Bannon de fermer les frontières et d'appliquer la remigration et de l'autre la tendance Musk dans la politique d'immigration choisie.